samedi 24 juillet 2010

Inception, de Christopher Nolan





Annoncé comme le blockbuster de l'été, le dernier Nolan va en refroidir plus d'un. Film de divertissement: oui, mais faut s'accrocher !
Ca faisait longtemps qu'un film ne m'avait pas demandé une telle attention, et ce dès la 1ère minute de film !
Faut aimer, moi j'aime. J'aime être porté par un film, mais j'aime aussi être forcé à pénétrer son récit, sa narration. Certains resteront sur le palier, d'autres auront la curiosité et la volonté de le franchir.
Inception est une sorte d'aboutissement du Prestige. En effet les deux ont pour thème central la manipulation. Nolan exploite un filon déjà utilisé à maintes reprises par divers cinéastes, dont Lynch et Cronemberg par exemple. Comme eux deux, il aime manipuler le spectateur et le positionner directement face au concept, mais contrairement aux cinéastes pré-cités, il intègre ses concepts dans des films de genre aux codes bien définis. Dans memento, le spectateur est comme dépossédé de la continuité du récit, puisqu'on ne connait jamais les évènements antérieurs, et se retrouve ainsi dans une situation de quasi-amnésie comme le héros du film.
Dans Le Prestige, il prend le prétexte de la vengeance pour détourner l'attention du spectateur, tout comme un illusionniste pourrait le faire. Si le film parle de magie, d'illusionnisme, Nolan conceptualise ainsi l'idée que le cinéma est l'art de l'illusion par excellence!
Inception, s'il est plus simpliste que ces précédents films quand a ses personnages (sorte de coquilles vides qui ne sont pas destinés à réellement exister mais bel et bien à rester des personnages de cinéma), et a ses thématiques (à part celle du remord il n'y a pas grand chose de "profond" à en tirer...), est tout de même d'une grande puissance formelle. Un umbroglio, une surenchère, de l'esbrouffe? Oui aussi, mais tellement bien foutue que ca laisse pantois. Nolan aura réussit, surtout avec un final certes quelque peu attendu mais tout de même troublant, à nous mettre face nous perdre volontairement dans les limbes de l'inconscient. A trop jouer avec la fiction on en perd toute réalité, le spectateur ne peut rester que circonspect devant un tel condensé de non-réponse ou la multitude possible de réponse, il ne sait plus où il en est, le rêve et la réalité se mèlent et l'art de la grande illusion du cinéma prend tout son sens. Inception m'a rappelé la fin du film de Cronemberg Existenz, où un personnage demande à Jude Law, qui est en train de le menacer avec un flingue: "Heu rassure-moi, on est encore dans le jeu (-virtuel- pour ceux qui n'auraient pas vu le film), là?". A la sortie d'Inception, le spectateur se pose la même question sans avoir de réponse: où est la réalité?

La faiblesse de la quasi totalité des derniers films manipulateurs depuis Usual suspect à Shutter Island, c'est de donner une explication. Toujours décevante, car toujours avec les mêmes ressorts, les même thèmes, les mêmes idées, mais aussi parce qu'elle lève le voile de l'illusion. La fascination disparait alors. Inception, malgré ses défauts (surtout le vide intersidéral de son récit - compensé par une multitude de rebondissements, blockbuster oblige, et de complexité scénaristique, Nolan oblige) restera fascinant pour oser ne rien révéler.
Il me faut un 2eme visionnage !

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